วันอังคารที่ 28 ธันวาคม พ.ศ. 2553

เอดัวร์ มาแน ( Édouard Manet )

  
     เอดัวร์ มาแน (ฝรั่งเศส: Édouard Manet, ฟังเสียง; 23 มกราคม ค.ศ. 1832 - 30 เมษายน ค.ศ. 1883) เป็นจิตรกรสมัยอิมเพรสชันนิสม์คนสำคัญของประเทศฝรั่งเศสในคริสต์ศตวรรษที่ 19 มีความสำคัญในการเขียนภาพสีน้ำมัน ผู้เป็นจิตรกรคนแรกในคริสต์ศตวรรษที่ 19ที่เขียนภาพเกี่ยวกับชีวิตประจำวันของคนทั่วไป มาแนเป็นจิตรกรคนสำคัญที่มีบทบาทในการเปลี่ยนจากการเขียนภาพแบบเหมือนจริง (Realism) ไปเป็นแบบอิมเพรสชันนิสม์


     “อาหารกลางวันบนลานหญ้า” (Le déjeuner sur l'herbe) และ “โอลิมเปีย” (Olympia) งานชิ้นเอกสองชิ้นของมาแนเป็นงานที่ทำให้เกิดมีความเห็นขัดแย้งกันมากและเป็นจุดที่ทำให้จิตรกรหนุ่ม ๆ รุ่นนั้นเริ่มหันมาวาดภาพอิมเพรสชันนิสม์—ซึ่งในปัจจุบันถือกันว่าเป็นจุดสำคัญของศิลปะที่แยกมาเป็นศิลปะสมัยใหม่


ชีวิต


เกิดที่ปารีสเมื่อวันที่ 23 มกราคม ค.ศ. 1832 ในครอบครัวที่มีฐานะดี เออเฌนี-เดอซีเร-ฟูร์นีเย (Eugénie-Desirée Fournier) แม่ของเอดัวร์เป็นลูกสาวของนักการทูตและเป็นหลานสาวของมกุฏราชกุมารสวีเดนชาลส์ เบอร์นาด็อตต์ (Charles XIV John of Sweden) เอากุสท์พ่อของเอดัวร์เป็นผู้พิพากษาผู้มีความประสงค์จะให้ลูกชายมีอาชีพเดียวกัน ชาร์ลส์ โฟนิเยร์ผู้เป็นลุงเป็นผู้ยุยงให้เอดัวร์เขียนภาพและมักจะพาไปชมภาพเขียนในพิพิธภัณฑ์ลูฟวร์ในปี ค.ศ. 1845 เอดัวร์ก็สมัครเข้าเรียนการวาดเส้นตามคำแนะนำของลุง ที่ที่พบอองโตนิน พรูสท์ผู้ต่อมาเป็นรัฐมนตรีกระทรวงวิจิตรศิลป์และกลายมาเป็นเพื่อนสนิทกันตลอดชีวิต

หลังจากการแนะนำของพ่อ ในปี ค.ศ. 1848 เอดัวร์ก็เดินทางไปกับเรือฝึกงานยังรีโอเดจาเนโร แต่หลังจากที่พยายามสอบเข้าราชนาวีไม่ได้สองครั้ง[1] พ่อของเอดัวร์จึงได้ยอมให้ลูกหันไปศึกษาทางศิลปะ ระหว่างปี ค.ศ. 1850 ถึงปี ค.ศ. 1856 เอดัวร์ก็ศึกษากับทอมัส คูทัวร์ (Thomas Couture) จิตรกรผู้เชี่ยวชาญทางการเขียนภาพประวัติศาสตร์ เมื่อมีเวลาว่างก็จะไปนั่งวาดรูปเลียนแบบภาพเขียนสำคัญๆ ในพิพิธภัณฑ์ลูฟวร์

ระหว่างปี ค.ศ. 1853 ถึงปี ค.ศ. 1856 เอดัวร์ก็เดินทางไปเที่ยวเยอรมนี อิตาลี และเนเธอร์แลนด์ ซึ่งเป็นโอกาสที่ทำให้ได้รับอิทธิพลการเขียนภาพของจิตรกรชาวดัตช์ ฟรันส์ ฮาลส์ (Frans Hals) และจิตรกรชาวสเปน เดียโก เบลัซเกซ (Diego Velázquez) และฟรันซิสโก โกยา

ในปี ค.ศ. 1856 เอดัวร์ก็เปิดห้องภาพของตนเอง ลักษณะการวาดภาพในช่วงเวลานี้เป็นฝีมือแปรงที่หยาบ ใช้รายละเอียดเพียงเล็กน้อย และยังไม่เริ่มใช้การแปลงโทนสี การวาดยังเป็นลักษณะแบบสัจจะนิยมที่ริเริ่มโดยกุสตาฟว์ กูร์แบ (Gustave Courbet) เอดัวร์เขียนภาพ “คนดื่มเหล้า” (The Absinthe Drinker) ระหว่างปี ค.ศ. 1858 ถึงปี ค.ศ. 1859 และภาพเขียนที่เป็นหัวเรื่องร่วมสมัยเช่น ภาพขอทาน นักร้อง ยิปซี หรือคนในร้านกาแฟ หรือการสู้วัว หลังจากสมัยการเขียนภาพระยะแรกเอดัวร์ไม่ได้เขียนภาพที่เกี่ยวกับศาสนา ตำนานเทพ หรือภาพประวัติศาสตร์ ตัวอย่างภาพเกี่ยวกับหัวข้อเหล่านี้ก็ได้แก่ “พระเยซูถูกเย้ยหยัน” (Christ Mocked) ที่ปัจจุบันอยู่ที่สถาบันศิลปะแห่งชิคาโกที่สหรัฐอเมริกา และ “พระเยซูและเทวดา” (Christ with Angels) ที่ปัจจุบันอยู่ที่พิพิธภัณฑ์เมโทรโปลิตันที่นครนิวยอร์ก


Édouard Manet


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Portrait d’Édouard Manet par Carolus-Duran autour de 1880

Naissance 23 janvier 1832

Paris, France

Décès 30 avril 1883

Paris, France

Nationalité Français

Activité(s) Artiste-peintre

Maître Thomas Couture

Mouvement artistique Œuvre isolée, instigatrice du champ artistique moderne, ouvrant vers l'impressionnisme, le naturalisme, le symbolisme, les Nabis...

Œuvres réputées Le Déjeuner sur l'herbe, Olympia, La lecture, Portrait de Berthe Morisot, Le bar aux Folies Bergères...

Récompenses 1882 : Chevalier de la Légion d'honneur remise par son ami Antonin Proust.



Édouard Manet (né à Paris le 23 janvier 1832 - mort à Paris le 30 avril 1883) est un peintre français majeur de la fin du XIXe siècle. Peintre de compositions à personnages, figures, nus, portraits, paysages, paysages urbains animés, natures mortes.



Refusant d'entrer à la faculté de droit comme le souhaitait son père, Édouard Manet tente le concours du Borda où il échoue. Il embarque néanmoins sur un bateau-école et part pour le Brésil d'où il ramène de nombreux dessins. De retour en France, il entre à l'atelier de Thomas Couture où il commence sa formation de peintre, et dès 1860, il présente ses premières toiles parmi lesquelles : Portrait de M. et Mme Auguste Manet.



Ses tableaux suivants, Lola de Valence, L'Homme mort, Combat de taureau, le Déjeuner sur l'herbe ou Olympia, font scandale. Manet est rejeté des expositions officielles, il joue alors un rôle de premier plan dans la « bohème élégante ». Il y fréquente des artistes qui l'admirent comme Fantin-Latour ou Edgar Degas et des hommes de lettres comme le poète Baudelaire ou le romancier Émile Zola dont il peint un portrait resté célèbre[1]. C'est aussi à cette époque qu'il peint Joueur de fifre (1866), le sujet historique de L'Exécution de Maximilien (1867) inspiré de la gravure de Francisco de Goya. Son œuvre comprend aussi des marines comme Clair de lune sur le port de Boulogne (1869) ou des courses : Courses à Longchamp en 1864 qui valent au peintre un début de reconnaissance.



Après la guerre de 1870 à laquelle il participe, Manet soutient les Impressionnistes parmi lesquels il a des amis proches comme Claude Monet, Auguste Renoir ou Berthe Morisot qui devient sa belle-sœur et dont il fera le célèbre portrait Berthe Morisot au bouquet de violettes (1872). A leur contact il délaisse en partie la peinture d'atelier pour la peinture en plein air à Argenteuil et Gennevilliers, où il possède une maison, et sa palette s'éclaircit comme en témoigne Argenteuil de 1874. Il conserve cependant son approche personnelle faite de composition soignée et de souci du réel, et continue à peindre de nombreux sujets, en particulier des lieux de loisir comme Au Café (1878), La Serveuse de Bocks (1879) et sa dernière grande toile Un bar aux Folies Bergère (1881-1882), mais aussi le monde des humbles (Paveurs de la Rue Mosnier, 1878) ou des autoportraits (Autoportrait à la palette, 1879).



Il peint aussi des natures mortes et des compositions florales (Roses et tulipe dans un vase, 1883), et des portraits de femmes (Nana, 1877, Femme blonde avec seins nus, 1878) ou de ses familiers comme le poète Stéphane Mallarmé en 1876 ou Georges Clemenceau en 1879-1880. Il est alors de plus en plus reconnu et reçoit la Légion d'honneur le 1er janvier 1882. Cependant, victime de syphilis et de rhumatismes, il souffre, à partir de 1876, de sa jambe gauche qu'il faudra amputer.



Édouard Manet meurt de la gangrène à 51 ans en 1883 et laisse plus de quatre cents toiles, des pastels, esquisses et aquarelles. Ses plus grandes œuvres sont aujourd'hui visibles dans tous les musées du monde, particulièrement au Musée d'Orsay à Paris.




Sommaire [masquer]

1 Premières années et Formation

1.1 Enfance

1.2 Voyage au Brésil

1.3 Apprentissage à l’atelier de Thomas Couture

2 Les débuts du peintre

2.1 Période hispanisante

2.1.1 Le thème espagnol

2.1.2 L'influence de Vélasquez

2.1.3 La Tauromachie et l'influence de Goya

2.2 Entrée dans la vie mondaine

3 Les défis - Gloire et scandale

3.1 Le Bain, ou Le Déjeuner sur l’herbe

3.2 Olympia, ou l’entrée dans la modernité

4 Maturité d'un regard de la peinture moderne

4.1 Famille

4.1.1 Sa compagne Suzanne Leenhoff

4.1.2 Son fils Léon Leenhoff

4.1.3 Sa belle-sœur Berthe Morisot

4.2 Portraits féminins

4.2.1 Victorine Meurent : la Femme selon Manet

4.3 Amitiés littéraires

4.4 Amitiés artistiques : la « bande à Manet »

4.5 Peintures historiques

4.6 Marines

4.7 Cafés et restaurants

5 La maladie et la mort

6 Un rôle majeur dans l'histoire de la peinture

7 Prolongements

8 Liste des œuvres

9 Correspondance

9.1 Bibliographie

10 Notes

10.1 Liens externes

11 Annexes



Premières années et Formation[modifier]

Enfance[modifier]



Portrait de M. et Mme Auguste Manet

1860 (111,5 x 91 cm) Musée d'Orsay, Paris.Édouard Manet naît le 23 janvier 1832 au numéro 5 de la rue Bonaparte (à l'époque rue des Petits Augustins), dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés dans une famille de la bourgeoisie parisienne. Son père Auguste, était un haut fonctionnaire au ministère de la Justice[2]. Selon les biographes, il occupait le poste de chef de cabinet du garde des Sceaux[3] ou de secrétaire général du ministère de la Justice[4]. La mère d'Édouard, Mme Eugénie Désirée Manet (née Fournier) était la fille d’un diplomate affecté à Stockholm et la filleule du Maréchal Bernadotte[4],[3]. Bien qu’élevé dans une famille aux mœurs austères, le jeune Édouard découvre rapidement le monde artistique grâce à l’influence d’un oncle assez excentrique, le capitaine Édouard Fournier, qui fait apprécier les grands maîtres à ses neveux Édouard et son frère Eugène dans les galeries du musée du Louvre.



À l’âge de douze ans, Édouard Manet est envoyé au collège Rollin (aujourd’hui le lycée Jacques-Decour), au pied de la butte Montmartre. Il a notamment pour professeur d’histoire le jeune Henri Wallon, dont l'Amendement allait plus tard constituer la pierre angulaire de la Troisième République. Les performances scolaires de Manet semblent avoir été décevantes : le jeune garçon se montre régulièrement dissipé, assez peu appliqué et fait même parfois preuve d’insolence. Son camarade Antonin Proust rapporte par exemple une altercation du futur peintre révolté avec Wallon au sujet d’un texte de Diderot sur la mode : le jeune homme se serait exclamé qu’« il faut être de son temps, faire ce que l’on voit sans s’inquiéter de la mode »[5]. Manet agrémente à cette époque la plupart de ses cahiers de caricatures.



Voyage au Brésil[modifier]



L'Évasion de Rochefort, 1881 (143 x 114 cm), Kunsthaus, Zurich.Manet obtient des résultats convenables au collège Rollin, bien que les études ne l'intéressent pas. Mais il refuse de s'inscrire à la faculté de droit malgré les pressions de son père, et il demande à entrer dans la marine après de pénibles débats en famille. Mais il échoue au concours du Borda, et le 9 décembre 1848 il s'embarque comme pilotin sur le bateau école « Le Havre et Guadeloupe »[6],à destination de Rio de Janeiro[7]. En 1849, Manet se présente de nouveau au concours du Borda et échoue de nouveau, mais il revient avec, dans ses bagages, une multitude de dessins devant lesquels son père se rend à l'évidence : Édouard est un artiste. On lui laissera choisir sa voie[6].



Son séjour au Brésil lui a donné un goût certain pour l’exotisme. L'influence de ce voyage est perceptible dans nombre de ses œuvres, notamment dans son Olympia considérée par Jules Claretie comme « une odalisque au ventre jaune, ignoble modèle ramassé je ne sais où (...)[8]. »



Ses voyages en bateau lui ont inspiré nombre de paysages marins parmi lesquels : Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama (1864)[9], L'arrivée à Boulogne du Kearsarge( 1864)[10], Le Steam-boat, marine ou Vue de mer, temps calme (1864-1865)[11], La jetée de Boulogne (1869)[12].



L'Évasion de Rochefort, n'a rien d'un paysage marin. C'est surtout un hommage à Henri Rochefort qui était devenu « la coqueluche du Boulevard[13] » à la suite de son évasion d’un bagne de Nouvelle-Calédonie. Manet, alors très vieux et malade, a demandé à rencontrer Rochefort pour obtenir des détails sur l'aventure, et le 4 décembre 1880, il écrit à Stéphane Mallarmé :« J'ai vu Rochefort hier, l'embarcation qui leur a servi était une baleinière de couleur gris foncé; six personnes, deux avirons. Amitiés[13]. » C'est à partir des récits de Rochefort qu'il compose deux tableaux dont l'un, où les personnages sont plus précis, est conservé au musée d'Orsay à Paris, l'autre au Kunsthaus de Zurich[13]. Dès le mois de janvier suivant, Manet exécute un portrait d'Henri Rochefort grandeur nature, actuellement conservé au musée de Hambourg. Ce portrait présenté avec Pertuiset, le chasseur de lions lui vaudra au salon de 1881 une seconde médaille (après celle de 1861)[14].



Apprentissage à l’atelier de Thomas Couture[modifier]



Portrait du Tintoret par lui-même, d'après le tableau du Louvre, 1854 (61 x 51 cm) Musée des Beaux-Arts de Dijon.Après son deuxième échec au concours du Borda, Manet refuse de s'inscrire aux Beaux-Arts[15], et il entre avec Antonin Proust, dans l’atelier du peintre Thomas Couture, en 1850, où il reste environ six ans. Manet perdra assez vite confiance en son maître et prend le contrepied de ses enseignements[16].



Thomas Couture est l’une des figures emblématiques de l’art académique de la seconde moitié du XIXe siècle, avec un attrait marqué pour le monde antique qui lui vaut un immense succès avec son chef- d'œuvre Romains de la décadence au salon de 1847[17]. Élève de Gros et de Delaroche, Couture est alors au sommet de sa gloire et c'est Manet lui-même qui insiste auprès de ses parents pour s'inscrire dans l'atelier du maître[17].



Manet consacre l’essentiel de ces six années à l’apprentissage des techniques de base de la peinture et à la copie de quelques œuvres de grands maîtres exposées au musée du Louvre, notamment : l’Autoportrait du Tintoret, le Jupiter et Antiope attribué au Titien ou Hélène Fourment et ses enfants, œuvre de Rubens. Il rend également visite à Delacroix auquel il demande la permission de copier La Barque de Dante, alors exposée au musée du Luxembourg[3].





Vénus d'Urbin, copie d'après le tableau de la galerie des Offices de Florence

1856 (24 x 37 cm) Coll. particulière.Manet complète sa formation par une série de voyages à travers l’Europe : on trouve trace de son passage au Rijksmuseum d’Amsterdam en juillet 1852. Il fait aussi deux séjours en Italie : le premier, en 1853, en compagnie de son frère Eugène et du futur ministre Émile Ollivier lui offre l'occasion de copier la célèbre Vénus d'Urbin du Titien, à la galerie des Offices de Florence, et à La Haye, il copie La Leçon d'anatomie de Rembrandt[18]. Au cours du second voyage en Italie, en 1857, Manet revient dans la cité des Médicis pour y croquer des fresques d’Andrea del Sarto au cloître de l’Annunziata. Outre les Pays-Bas et l’Italie, l’artiste a encore visité en 1853 l’Allemagne et l’Europe centrale, en particulier les musées de Prague, Vienne, Munich ou Dresde.



L’indépendance d’esprit de Manet et son obstination à choisir des sujets simples déroute Couture qui pourtant, demande son opinion à son élève sur un de ses propres tableaux : Portrait de Mlle Poinsot[3]. Manet vient de terminer Le Buveur d'absinthe que Couture ne comprend pas et les deux hommes se brouillent. Manet quitte l’atelier Couture en 1856, et il emménage dans son propre local, rue Lavoisier, avec son ami, Albert de Balleroy.



C'est dans cet atelier qu'il peint, en 1859, le portrait intitulé L'Enfant aux Cerises. L'enfant était âgé de 5 ans et Manet l'avait engagé pour laver ses brosses. Il a été retrouvé pendu dans l'atelier par Manet, qui, frappé par ce suicide, s'installe dans un autre local. Cet épisode dramatique inspirera plus tard à Charles Baudelaire un poème : La Corde, qu'il dédie à Édouard Manet[19].



Les débuts du peintre[modifier]

Période hispanisante[modifier]

Le thème espagnol[modifier]



Jeune Homme en costume de majo

1863 (188 x 125 cm)

Metropolitan Museum of Art, NY.

Mlle V. en costume d'espada

1862 (165,1 x 127,6 cm)

Metropolitan Museum of Art, NY.Les deux premiers tableaux à thème espagnol, Jeune Homme en costume de majo et Mlle V. en costume d’espada, qui sont présentés au Salon des Refusés de 1863 avec le déjeuner sur l'herbe, déroutent les critiques et suscitent de vives attaques malgré le soutien d'Émile Zola qui voit là « une œuvre d'une vigueur rare et d'une extrême puissance de ton (...) Selon moi, le peintre y a été plus coloriste qu'il n'a coutume de l'être. Les taches sont grasses et énergiques et elles s'enlèvent sur le fond avec toutes les brusqueries de la nature[20]. »



Le Jeune Homme en costume de majo est le jeune frère de Manet, Gustave. Quant à Mlle V.,c'est un audacieux portrait du modèle fétiche de Manet, Victorine Meurent, travestie en homme. Sur cette toile, Victorine feint de participer en tant qu’espada à une tauromachie. Tout est mis en œuvre cependant pour montrer que le sujet n’est qu’une supercherie : Victorine, du fait de la menace représentée par le taureau, ne devrait normalement pas fixer le spectateur avec autant d'insistance. L'ensemble de la scène est tout simplement un prétexte visant à représenter la modèle dans des habits masculins et donc à faire ressortir de manière plus éclatante encore sa féminité.



Les attaques de Théophile Thoré-Burger sont particulièrement virulentes : « (...) une demoiselle de Paris en costume de espada, agitant son manteau pourpre dans le cirque d'un combat de taureau. Monsieur Manet adore l'Espagne et son maître d'affection paraît être Francisco de Goya dont il imite les tons vifs et heurtés[21]. »



Il est vrai que Manet ne visita l'Espagne qu'en 1865, et qu'il ne s'est peut-être familiarisé avec les coutumes de Madrid et les détails de la corrida qu'à travers le Voyage en Espagne de Théophile Gautier, ou les détails de la corrida donnés par Prosper Mérimée[22]. Il avait en outre, dans son atelier, une collection de costumes qu'il utilisait comme accessoires et qui lui étaient fournis par un marchand espagnol du passage Jouffroy. Comme le remarque Beatrice Farwell, on retrouve le costume de Mlle V dans d'autres tableaux de Manet : le Chanteur espagnol et le Jeune homme en costume de majo[23].



L'influence de Vélasquez[modifier]



Le Buveur d'absinthe 1858-1859 (180,5 x 105,6 cm) Ny Carlsberg Glyptotek, Copenhague.Après quelques années employées à copier de grands tableaux, c’est au Salon de 1859 que Manet se décide à dévoiler officiellement sa première œuvre, intitulée Le Buveur d'absinthe. La toile, de facture réaliste, dénote l’influence de Gustave Courbet, mais constitue surtout un hommage à celui que Manet a toujours considéré comme « le peintre des peintres »[24], Diego Vélasquez : « j'ai, dit-il essayé de faire un type de Paris en mettant dans l'exécution la naïveté du métier que j'ai trouvée chez Vélasquez[15]. »



Beaucoup de peintures d’Édouard Manet comportent ainsi des références au maître espagnol.





Lola de Valence 1862 (123 x 92 cm) Musée d'Orsay.Cependant, Le Buveur d'absinthe sera refusé au Salon de 1859. Le jury ne comprend pas cette œuvre qui illustre d'une certaine manière le Vin des chiffonniers de Baudelaire « buvant et se cognant au mur comme un poète [15].» De même Thomas Couture considère que le seul buveur d'absinthe est ici le peintre[15]. Manet apprend ce refus en présence de Baudelaire, de Delacroix et d'Antonin Proust. et il pense que c'est Thomas Couture qui en est responsable « Ah! il m'a fait refuser! Ce qu'il a dû en dire devant les bonzes de son acabit (...)[25]. »



Le jeune artiste bénéficie pourtant de plusieurs soutiens remarqués, avec notamment Eugène Delacroix[26], qui assure sa défense auprès du jury, et surtout Charles Baudelaire[15], qui venait de faire sa connaissance et s’employait à le faire connaître dans la société parisienne.





Le Chanteur espagnol 1860 (147,3 x 114,3 cm) Metropolitan Museum of ArtManet, à ce moment-là, est fasciné par l’art espagnol [27], qu’il associe au réalisme, par opposition à l’art italianisant des Académiques. Déjà bien avant son premier voyage en Espagne en 1865, Manet consacre plusieurs toiles à ce qu’il désigne lui-même comme des « sujets espagnols » : danseuse Lola de Valence, et le guitarero du Chanteur espagnol.



Le Chanteur espagnol lui vaut son premier succès. Il est accepté au Salon de Paris en 1861 avec le le portrait de ses parents[28]. Les critiques Jean Laran et Georges Le Bas rapportent qu'il fit l'admiration d'Eugène Delacroix et de Ingres et que ce fut sans doute grâce à l'intervention de Delacroix que le tableau obtint la mention « honorable »[28]. Il plaît aussi à Baudelaire et à Théophile Gautier qui déclare dans Le Moniteur universel du 3 juillet 1861 : « Il y a beaucoup de talent dans cette figure de grandeur naturelle peinte en pleine pâte, d'une brosse vaillante et d'une couleur très vraie[29]. »



Les diverses influences pour ce tableau ont fait l'objet de discussions nombreuses. Selon Antonin Proust, Manet aurait déclaré lui-même :« En peignant cette figure, je pensais aux maîtres de Madrid, et aussi à Hals[30] ». Les historiens d'art ont également évoqué l'influence de Goya (en particulier de l'eau forte : Le Chanteur aveugle), Murillo, Diego Vélasquez ainsi que celle de Gustave Courbet dans sa tendance réaliste[30].



Le tableau fut également admiré par un groupe de jeunes artistes : Alphonse Legros, Henri Fantin-Latour, Edgar Degas et d'autres. Cette rencontre avec les jeunes peintres fut décisive, car elle désigna Manet comme le chef de file de l'avant-garde[31].



La Tauromachie et l'influence de Goya[modifier]



L'Homme mort 1864-1865 (75,9 x 153,3 cm) National Gallery of Art, Washington D.C..

Combat de taureau 1865-1865 (90 x 110 cm) Musée d'Orsay, Paris.

La Corrida 48 x 108 cm, Frick Collection, New York.Une des toiles de Manet les plus connues, traitant de tauromachie, est son Homme mort, daté de 1864.



L’œuvre, à l’origine, n’est en fait qu’une partie d’une composition plus vaste destinée au Salon de la même année, et intitulée Épisode d’une course de taureaux : le peintre, mécontent des critiques acerbes de Théophile Thoré-Burger[32] et des caricatures que Bertall en a fait dans « Le Journal amusant », découpe l'l'Épisode en deux parties qui formeront deux toiles autonomes : L'Homme mort et La Corrida[33]conservée à la Frick Collection à New York[34].



Manet découpe La Corrida de façon à garder trois toreros à la barrière (premier titre choisi pour cette œuvre était d'ailleurs Toreros en action), mais s'il voulait garder les hommes en pied, il fallait qu'il coupe pratiquement tout le taureau. L'artiste décida plutôt de couper les pieds du torero de gauche et de rogner sur la foule dans les gradins[35].



Lorsque Manet a réalisé Épisode d’une course de taureaux, il n'était encore jamais allé en Espagne. C'est à la suite de ce voyage qu'il exprime son admiration pour la corrida dans une lettre adressée à Baudelaire le 14 septembre 1865: « Un des plus beaux, des plus curieux, et des plus terribles spectacles que l'on puisse voir, c'est une course de taureaux. J'espère, à mon retour, mettre sur la toile l'aspect brillant, papillotant et en même temps dramatique de la corrida à laquelle j'ai assisté[36]. » C'est sur ce même thème, qu'il a réalisé plusieurs grands formats : Le Matador saluant[37] que Louisine Havemeyer acheta à Théodore Duret [38], et Combat de taureau[39] actuellement conservé au Musée d'Orsay à Paris.



Étienne Moreau-Nélaton et Adolphe Tabarant[40], s'accordent à dire que le frère de Manet, Eugène, a servi de modèle pour le personnage du matador saluant, et qu'il s'agit bien d'un torero applaudi par la foule après la mort du taureau[41].



Manet commence le Combat de taureau, à son retour de voyage en Espagne, en 1865. Dans son atelier de Paris, rue Guyot (aujourd'hui rue Médéric), il est possible qu'il ait utilisé à la fois des croquis faits sur place en Espagne (croquis que l'on n'a pas retrouvés à l'exception d'une aquarelle), mais aussi des gravures de La Tauromachie de Francisco de Goya qu'il possédait[42]. Manet vouait une grande admiration au peintre espagnol qui l'a encore influencé sur d'autres sujets que la tauromachie notamment pour L'Exécution de Maximilien.



Entrée dans la vie mondaine[modifier]



La Musique aux Tuileries

1862 (76 x 118 cm) National Gallery, Londres.Édouard Manet, d'après la description qu'en fait Antonin Proust, était un jeune homme plein d’assurance, volontiers amical et sociable. C’est pourquoi l’époque de ses premiers succès est aussi celle de son entrée remarquée dans les cercles intellectuels et aristocratiques parisiens.



« Il se forma autour de Manet une petite cour. Il allait presque chaque jour aux Tuileries de deux à quatre heures.(...) Baudelaire était là son compagnon habituel. On regardait curieusement ce peintre élégamment vêtu qui disposait sa toile, s'armait de sa palette, et peignait[43] » La description de Proust donne une idée assez juste de Manet qui était bien un des dandys en haut de forme de son tableau, habitués de son atelier, des Tuileries et du café Tortoni de Paris, café élégant du boulevard, où il prenait son déjeuner[44], avant d'aller aux Tuileries. « Et quand il revenait chez Tortoni de cinq à six heures, c'était à qui le complimenterait sur ses études qu'on se passait de main en main[45]. »



Avec La Musique aux Tuileries(1862) Manet brosse le tableau de l'univers élégant dans lequel il évoluait. Le tableau dépeint un concert donné au jardin des Tuileries et dans lequel le peintre représente des personnes qui lui sont proches.



On distingue, de gauche à droite, un premier groupe de personnages masculins parmi lesquels son ancien compagnon d'atelier Albert de Balleroy, Zacharie Astruc (assis), Charles Baudelaire debout, et derrière Baudelaire, à gauche : Fantin-Latour[46]. Parmi les hommes, Manet a placé son frère Eugène, Théophile Gautier, Champfleury, le baron Taylor, Aurélien Scholl[15]. La première dame habillée en blanc en partant de la gauche est Mme Lejosne, femme du commandant Hippolyte Lejosne chez lequel Manet a fait la connaissance de Baudelaire. Ceux qui fréquentaient Lejosne étaient tous des amis de Manet[47]. A côté de Mme Lejosne se trouve Mme Offenbach.



Le peintre s’est lui-même représenté sous les traits du personnage barbu le plus à gauche de la composition. A sa droite, assis contre le tronc, on reconnait « celui que Manet appelait le Mozart des Champs Élysées : Gioacchino Rossini[48]. »



Le tableau fut jugé sévèrement par Baudelaire qui n'en parla pas en 1863[49] et il fut vivement attaqué par Paul de Saint-Victor : « Son concert aux Tuileries écorche les yeux comme la musique des foires fait saigner l'oreille[49]. » Hippolyte Babou parle de la « manie de Manet de voir par taches (...) la tache-Baudelaire, la tache-Gautier, la tache-Manet [50]. »





Bal masqué à l'opéra

1873 (59 x 72,5 cm)

National Gallery of Art, Washington.La Musique aux Tuileries est en fait le premier modèle de toutes les peintures impressionnistes et post-impressionnistes qui représentent la vie contemporaine en plein air. Il a inspiré dans les décennies suivantes : Frédéric Bazille, Claude Monet, et Auguste Renoir[49]. Sa postérité sera immense.



Toutefois, à cette époque, Manet n'est pas encore le peintre de plein air qu'il deviendra par la suite. L'image de cette élégante société du Second empire qu'il a groupée sous les arbres est certainement un travail d'atelier[46]. Les personnages qui sont de véritables portraits sont peut-être peints d'après des photographies[51].



Plus de dix années plus tard, au printemps 1873, Manet réalisera une toile d’une facture similaire à celle de La Musique aux Tuileries, intitulée Bal masqué à l'opéra et où figurent plusieurs de ses connaissances. L’opéra en question, situé rue Le Peletier dans le IXe arrondissement, devait d’ailleurs être réduit en cendres par un incendie la même année. Un autre rendez-vous mondain parisien de l'époque, les courses hippiques de Longchamp, inspirent au peintre un tableau : Les Courses à Longchamp.



Les défis - Gloire et scandale[modifier]

Pour la première fois dans l’histoire du Salon officiel et annuel de Paris, on permet en 1863 aux artistes refusés d’exposer leurs œuvres dans une petite salle annexe à l’exposition principale, où les visiteurs peuvent les découvrir : c’est le fameux Salon des Refusés. Édouard Manet, en y exposant trois œuvres controversées, s’impose comme une figure de l’avant-garde.



Le Bain, ou Le Déjeuner sur l’herbe[modifier]

Article détaillé : Le Déjeuner sur l'herbe





Le Bain ou Le Déjeuner sur l'herbe

1863 (208 x 264 cm) Musée d'Orsay, Paris.Parmi les trois peintures exposées au Salon, la composition centrale du Déjeuner sur l’herbe suscite les réactions les plus vives. Dans cette œuvre, Manet y confirme sa rupture avec le classicisme et l’académisme qu'il avait commencée avec La Musique aux Tuileries. Il se rapproche ainsi de l' Impressionnisme, et selon un critique de l’époque.



Mais la polémique vient moins du style de la toile que de son sujet : si le nu féminin est déjà répandu et apprécié, à condition d’être traité de façon pudique et éthérée, il est encore plus choquant de faire figurer dans la même composition deux hommes tout habillés [réf. nécessaire]. Une telle mise en scène, exclue en effet la possibilité d’une interprétation mythologique et donne au tableau une forte connotation sexuelle. Le critique Ernest Chesneau, résumant ce malaise, affirme ne pouvoir « trouver que ce soit une œuvre parfaitement chaste que de faire asseoir sous bois, entourée d’étudiants en béret et en paletot, une fille vêtue seulement de l’ombre des feuilles »[52].[précision nécessaire] Le Déjeuner sur l’herbe ne fait pourtant que s’inspirer d’une œuvre de Raphaël représentant deux nymphes, et du Concert champêtre du Titien, la seule différence avec ces deux peintures étant les vêtements des deux hommes. Manet, de cette manière, relativise et ridiculise les goûts et les interdits de son époque [53].



Olympia, ou l’entrée dans la modernité[modifier]

Article détaillé : Olympia





Olympia

1863 (130,5 x 190 cm) Musée d'Orsay, Paris.Bien que Manet ait finalement décidé de ne pas l’exposer au Salon des Refusés et de ne la dévoiler que deux ans plus tard, c’est en 1863 qu'est réalisée la toile d’Olympia. L’œuvre, qui allait susciter une controverse encore plus féroce que le Déjeuner sur l'herbe, représente une prostituée semblant sortir tout droit d’un harem à l’orientale et s’apprêtant visiblement à recevoir un client qui s'annonce avec un bouquet. Le tableau, qui associe et fait ressortir avec puissance le contraste entre la femme blanche et la femme noire, s’inscrit dans la longue tradition artistique et très académique dite de « l’odalisque à l’esclave » à l'instar des Odalisques d’Ingres, de l’Odalisque de Benouville et de celle de Jalabert dans les années 1840. Mais Olympia, avant tout, se veut une référence audacieuse à la célèbre Vénus d'Urbin du Titien.



Contrairement au Déjeuner sur l’herbe, Olympia n’est donc pas tant choquante par son thème que par la manière dont ce thème est traité. Outre sa nudité, le modèle (Victorine Meurent) affiche une insolence et une provocation indéniables [54][réf. insuffisante].



L’atmosphère générale d’érotisme, surtout, est renforcée par la présence du chat noir à la queue relevée, aux pieds de la jeune fille. L’animal fut ajouté par Manet, non sans humour, afin de remplacer l’innocent chien figurant dans la Vénus d’Urbin, et peut-être également afin de désigner par métaphore ce que la jeune fille cache précisément de sa main. D’autres éléments de la composition ont longtemps perturbé les critiques : c’est le cas du bouquet de fleurs, nature morte s’invitant de manière incongrue dans un tableau de nu, mais aussi du bracelet (qui appartenait à la mère du peintre) et de la grossièreté de la perspective. Bien que Manet ait à l’évidence cherché le scandale, l’avalanche de récriminations dont il est la victime l’accable assez fortement, et le soutien de son ami Charles Baudelaire l’aide à passer ce cap difficile de sa vie. (voir infra)

[réf. nécessaire]



Maturité d'un regard de la peinture moderne[modifier]

Édouard Manet réalise des œuvres d’une remarquable variété, allant des portraits de son entourage (famille, amis écrivains et artistes) aux marines et aux lieux de divertissement en passant par les sujets historiques. Toutes vont influencer de façon marquée l’école impressionniste.



Famille[modifier]

Sa compagne Suzanne Leenhoff[modifier]



La Lecture

Vers 1865 (74 x 61 cm)

Musée d'Orsay, Paris.Suzanne Leenhoff est sans aucun doute la Néerlandaise corpulente et placide, que Berthe Morisot appelait affectueusement « la grosse Suzanne »[réf. nécessaire]. Elle avait en effet le tempérament adéquat pour vivre aux côtés du peintre et supporter avec le sourire ses nombreuses infidélités. Édouard Manet, attaché à Suzanne pour l'équilibre qu'elle lui apportait, finit par l'épouser en octobre 1863, alors qu'il en avait eu, selon Adolphe Tabarant, un fils, Léon, dès 1852. Le père de Manet était décédé un an avant ce mariage.



La silhouette tranquille et apaisante de Suzanne figure à de nombreuses reprises dans l'œuvre de Manet. On compte plusieurs portraits restés célèbres, notamment La Lecture, où Mme Manet écoute avec attention les paroles de son fils Léon : les tonalités et les couleurs de cette toile, très douces, en font un remarquable exemple d'impressionnisme. Dans Suzanne Manet à son piano, l'époux de la jeune femme met en valeur le grand talent qu'elle avait pour jouer cet instrument, au point qu'elle a pu apaiser les derniers jours de Baudelaire en jouant du Wagner. Enfin, c'est également la fidèle compagne du peintre qui sert de modèle au nu féminin de La Nymphe surprise.



Son fils Léon Leenhoff[modifier]



Le Déjeuner dans l'atelier

1868 (118 x 154 cm)

Neue Pinakothek, Munich.Bien qu’aucune preuve directe de paternité ne puisse être établie, Édouard Manet est sans aucun doute le père biologique du fils de Suzanne, Léon Leenhoff, qu’il a élevé d’ailleurs comme son fils. Les raisons ayant poussé le peintre à ne jamais reconnaître sa paternité, même après son mariage, restent assez énigmatiques, de même que la nature exacte des relations qu’il entretenait avec le jeune garçon. Ce dernier, jusqu’à un âge avancé, l’appelait « parrain », d’où une certaine ambiguïté.





Les Bulles de savon

1867 (100,5 x 81,4 cm)

Musée Calouste Gulbenkian, Lisbonne.Il est possible de suivre le mûrissement progressif de Léon à travers les portraits que Manet a fait de lui, depuis l’enfance jusqu’à l’adolescence. C’est encore un tout jeune enfant qui pose, déguisé en page espagnol, dans L'Enfant à l'épée, à l’époque où le peintre accumulait les sujets espagnols. Plus tard, dans Les Bulles de savon, un Léon âgé de quinze ans s’amuse à faire des [bulles dans un bol de savon, peut-être afin de symboliser la brièveté de la vie. Mais surtout, on retient de Léon Leenhoff le visage d’un adolescent rêveur et mystérieux, tel qu’il apparaît dans le célèbre Déjeuner dans l'atelier, réalisé à l’appartement familial de Boulogne-sur-Mer, où les Manet passaient l’été. Cette toile, acceptée et exposée au Salon de Paris de 1869, résume parfaitement l’œuvre de Manet en ce qu’elle a parfois de bizarre ou d’absurde grâce à un rassemblement d’éléments totalement hétéroclites : trois personnages indifférents les uns aux autres, un repas mêlant huîtres et café, des armes et des accessoires de combat, sans oublier bien sûr la présence de l’incontournable chat noir, qui, depuis Olympia, symbolise Manet aux yeux des critiques.



Sa belle-sœur Berthe Morisot[modifier]



Berthe Morisot au bouquet de violettes (détail)

1872 (55 x 38 cm)

Coll. particulière.

Le Balcon

1868-1869 (170 x 124 cm)

Musée d'Orsay, Paris.Un jour qu’il déambule au musée du Louvre, Manet, par l’intermédiaire de Fantin-Latour, fait la connaissance d’une jeune peintre dont le talent novateur et la beauté mélancolique semblent ne faire qu’un. D’emblée impressionné par Berthe Morisot, Manet la persuade de poser pour lui dans différents tableaux. Outre le remarquable Berthe Morisot au bouquet de violettes, encensé plus tard par Paul Valéry, c’est surtout Le Balcon qui va frapper les esprits. La toile, inspirée des Majas au balcon de Francisco Goya, a été réalisée à la même époque et dans la même intention que le Déjeuner dans l'atelier. Les trois personnages, tous amis de Manet, semblent n’être reliés par rien : tandis que Berthe Morisot, à gauche, fait figure d’héroïne romantique et inaccessible, la jeune violoniste Fanny Claus et le peintre Antoine Guillemet paraissent habiter un autre monde. Le vert agressif et audacieux du balcon, par ailleurs, a fait couler beaucoup d’encre.



Berthe Morisot devient la belle-sœur de Manet en 1874 lorsqu’elle se marie avec le frère de ce dernier, Eugène. Influencée notamment par son beau-frère, elle s’imposera ensuite comme une figure essentielle du mouvement impressionniste.



Portraits féminins[modifier]



Nana

1877 (154 x 115 cm)

Kunsthalle, Hambourg.Antonin Proust, qui fréquentait Manet depuis l’enfance, avait l’avantage de connaître intimement son caractère : selon lui, même au plus fort de la maladie du peintre, « la présence d’une femme, n’importe laquelle, le remettait d’aplomb »[5]. Édouard Manet, en grand amateur de femmes qu’il était, en vint naturellement à peindre la gent féminine en abondance. Bien loin de se limiter aux seules Suzanne Leenhoff et Victorine Meurent, le peintre a immortalisé les traits d’un grand nombre de ses amies. Ainsi, dans La Prune (voir face au sommaire), l’actrice Ellen Andrée pose complaisamment dans un décor de café, et semble figée dans une rêverie douce et mélancolique.



Dans la droite lignée d’Olympia, Manet se plaît également à représenter sans faux-semblant la vie de plusieurs courtisanes ou « créatures » entretenues, la plus célèbre en ce domaine étant Nana. Cette toile, qui date de trois ans avant la parution du roman homonyme de Zola, reprend avec beaucoup plus de légèreté et de futilité le thème de la grave Olympia, sous les traits de l’actrice Henriette Hauser. Le titre pourrait avoir été donné par Manet postérieurement à la réalisation du tableau, lorsqu’il apprit le titre du prochain ouvrage de Zola. Une autre explication voudrait que Manet ait été inspiré par le roman L'Assommoir, dans lequel une Nana encore toute jeune fille fait sa première apparition, et reste précisément « des heures en chemise devant le morceau de glace accroché au-dessus de la commode »[55]. Le tableau, comme il se doit, fut refusé au Salon de Paris de 1877.



Victorine Meurent : la Femme selon Manet[modifier]



Portrait de Victorine Meurent

1862 (42,9 x 43,7 cm)

Museum of Fine Arts, Boston.Le visage de Victorine Meurent, aisément reconnaissable, est celui qui revient le plus régulièrement dans l’œuvre de Manet. Le peintre, subjugué par la beauté fraîche et un peu insolente de la jeune femme, en fait très rapidement son modèle préféré, notamment pour ses peintures de nu. Victorine apparaît ainsi dans les tableaux les plus célèbres de Manet : en premier lieu dans Le Déjeuner sur l'herbe, bien sûr, où elle est dépeinte assise et entièrement dévêtue. La mystérieuse Olympia, de même, n’est autre que Victorine. Édouard Manet, dans chacun de ces deux cas, altère légèrement les traits de la jeune femme pour qu'ils correspondent mieux avec l’idée qu’il se fait de la toile à accomplir.





Le Chemin de fer

1872 – 1873 (93,3 x 111,5 cm)

National Gallery of Art, Washington D.C..À ceux qui auraient pu reprocher au peintre de ne réaliser que des nus lascifs et provocants de sa jeune égérie, Manet répond par deux très beaux portraits d’une Victorine habillée de pied en cap. Dans La Chanteuse de rue, Manet déguise son modèle en une modeste chanteuse sortant d’un cabaret à la nuit tombée et dégustant étrangement quelques cerises. La Femme au perroquet avec son petit bouquet de violettes, quant à elle, est surtout un clin d’œil à une toile homonyme de Gustave Courbet représentant une femme nue avec un perroquet.



Plus de dix années après la grande époque des scandales, c’est sans doute pour rendre hommage à leur longue relation artistique et [amoureuse qu’Édouard Manet réalise un dernier portrait de Victorine, Le Chemin de fer, où l’ancienne femme libérée s’est métamorphosée en une dame parfaitement respectable tenant compagnie à une petite fille, devant la gare Saint-Lazare. Cette œuvre, marquée par le symbole de la grille en fer, semble tirer un trait sur le passé avec une certaine amertume, et le chat inquisiteur d’Olympia laisse place à un petit chien sagement endormi. Cependant, dès cette époque, la santé de Manet devient précaire.



Amitiés littéraires[modifier]



Le Joueur de fifre

1866 (161 x 97 cm)

Musée d'Orsay, Paris.Alors même qu’il n’était encore qu’un jeune peintre, Édouard Manet avait déjà fait conquis l’amitié de Charles Baudelaire. Les deux hommes se rencontrent dès 1859 dans le salon du commandant Lejosne, ami de la famille Manet. Bien que Baudelaire n’ait jamais écrit publiquement pour soutenir son ami, y compris pendant le scandale du Salon des Refusés de 1863, il tient le talent du jeune homme en haute estime dès la présentation du Buveur d'absinthe. Comme il l’avait noté en 1865, peu avant sa mort, « il y a des défauts, des défaillances, un manque d’aplomb, mais il y a un charme irrésistible. Je sais tout cela, je suis un des premiers qui l’ont compris »[56].



L’amitié de Charles Baudelaire a été particulièrement bénéfique à Manet après la présentation d’Olympia : le peintre avait été abattu par les critiques féroces qui lui avaient été adressées, et en avait touché un mot à son ami, alors à Bruxelles. La lettre mémorable que Baudelaire envoie en réponse est à la fois ferme et amicale : invitant Manet à faire taire son orgueil, le poète relativise la portée de ces attaques par rapport à celles dont d’autres grands artistes sont victimes. Manet n’est somme toute « que le premier dans la décrépitude de [son] art »[57]. Ce commentaire corrosif, dans la bouche d’un poète fasciné par le thème de la décadence, est bien sûr en réalité un compliment. La mort de Baudelaire, survenue prématurément en 1867, a été un coup rude pour Manet et sa femme Suzanne, qui perdaient à la fois un protecteur et un ami.





Portrait d'Émile Zola

1868 (146 x 114 cm)

Musée d'Orsay, Paris.C’est à cette époque qu’Édouard Manet reçoit le soutien d’un jeune auteur de vingt-six ans, Émile Zola[58]. Ce dernier, révolté par le refus opposé au Joueur de fifre pour le Salon officiel de 1866, publie la même année un article retentissant dans L’Événement, dans lequel il prend la défense du tableau. L’année suivante, Zola va jusqu’à consacrer une étude biographique et critique très fouillée à Édouard Manet, afin de permettre la « défense et illustration » de sa peinture, qu’il qualifie de « solide et forte »[59].



Manet en est très reconnaissant envers son nouvel ami, et il réalise dès 1868 le Portrait d'Émile Zola, accepté au Salon de la même année. La toile contient plusieurs éléments anecdotiques et discrets révélant l’amitié des deux hommes : outre la reproduction d’Olympia accrochée au mur, et dans laquelle le regard de Victorine Meurent a d’ailleurs été légèrement modifié par rapport à l’original afin de fixer Zola, on distingue sur le bureau le livre bleu-ciel que l’écrivain avait rédigé pour défendre Manet. L’entente entre les deux hommes, toutefois, ne durera pas : de plus en plus perplexe face à l’évolution impressionniste que connaissait le style de Manet, bien loin du réalisme qu’il prisait, Zola finit par rompre tout contact.





Portrait de Stéphane Mallarmé

1876 (27 x 36 cm)

Musée d'Orsay, Paris.Plus tard dans sa vie, Manet retrouvera chez un homme de lettres l’amitié profonde et spirituelle qu’il avait ressentie pour Baudelaire, en la personne de Stéphane Mallarmé[60]. Ce dernier, plus jeune de dix ans, ressent une telle admiration pour l’art de Manet qu’il publie à Londres, en 1876, un article élogieux à son sujet, en anglais. Dans ce texte, intitulé Les Impressionnistes et Édouard Manet, Mallarmé prend la défense de son compatriote, et en particulier du tableau Le Linge, une représentation sans prétention d’une jeune femme des Batignolles lavant son linge, œuvre refusée au Salon car mêlant un thème trivial et un style impressionniste. Manet exécute en retour un Portrait de Stéphane Mallarmé dont Georges Bataille, déclare « qu'il est le plus heureux de la peinture [61].» « Paul Valéry associait ce qu'il appela « le triomphe de Manet » à la rencontre de la poésie, en la personne de Baudelaire d'abord, puis de Mallarmé [61]. »



Amitiés artistiques : la « bande à Manet »[modifier]

Article détaillé : Groupe des Batignolles





Monet peignant dans son atelier

1874 (50 x 64 cm)

Neue Pinakothek, Munich.Au fur et à mesure que Manet gagne en âge, un nombre grandissant de jeunes artistes se revendiquent de son esprit en s’opposant à leur tour à l'esthétisme officiel. Prônant la peinture en plein air et se qualifiant eux-mêmes, tour à tour, d’Intransigeants, de Réalistes ou encore de Naturalistes, la critique va finalement, avec ironie, les surnommer « Impressionnistes ». Parmi ces jeunes talents, certains vont se rapprocher de Manet et former le groupe dit « des Batignolles », ainsi nommé en référence au quartier des Batignolles où se trouvaient l’atelier de Manet et les principaux cafés que la bande fréquentait. On compte notamment dans ce groupe les peintres Paul Cézanne, Auguste Renoir, Frédéric Bazille ou Claude Monet.





Argenteuil

1874 (149 x 115 cm)

Musée des Beaux-Arts, Tournai.De tous ces jeunes disciples, l’ami le plus intime de Manet est incontestablement Claude Monet, futur chef de file de l’impressionnisme. Les familles des deux peintres, deviennent vite très proches et passent de longues journées ensemble dans la verdure d’Argenteuil, chez les Monet. Ces visites régulières sont l’occasion pour Édouard Manet de réaliser plusieurs portraits intimistes de son ami, comme celui ironiquement appelé Claude Monet peignant dans son atelier, et surtout de s’essayer à imiter le style et les thèmes favoris de ce dernier, en particulier l’eau. L’émulation est visible dans Argenteuil, où Manet force volontairement son trait pour se rapprocher de l’impressionnisme par nature plus tranché de Monet, avec une Seine d’un bleu outrancier.





La Rue Mosnier aux drapeaux

1878 (65,5 x 81 cm)

J. Paul Getty Museum, Los Angeles.Cette admiration réciproque n’empêche cependant pas les deux hommes de développer, indépendamment l’un de l’autre, leurs propres styles. On peut ainsi utilement comparer deux vues de Paris réalisées le même jour sur le même sujet en 1878, à l’occasion de l’Exposition universelle : tandis que La Rue Mosnier aux drapeaux de Manet présente un paysage austère et presque aride, le faste luxuriant de La Rue Montorgueil de Monet révèle un point de vue radicalement différent.



Édouard Manet est également très lié au peintre Edgar Degas, bien que ce dernier n’ait pas fait spécifiquement partie du groupe des Batignolles. Les deux hommes sont inséparables aux heures sombres de la guerre franco-allemande de 1870 lorsque, pris au piège dans le Paris assiégé en compagnie de son ami, Manet ne pouvait communiquer que par lettres avec sa femme Suzanne réfugiée en province. Manet et Degas se trouvent d’autres affinités pendant la Commune de Paris par leur opposition conjointe au parti versaillais. Bien que les deux hommes se soient souvent querellés et affrontés pour obtenir la prééminence dans l’avant-garde artistique, Degas conservera toujours une grande estime pour Manet et contribuera à promouvoir l’œuvre de ce dernier après sa mort.



Peintures historiques[modifier]



Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama

1865 (134 x 127 cm)

Philadelphia Museum of Art.La peinture historique, en raison de son caractère très académique, reste un genre nettement marginal dans l’œuvre de Manet, et seules deux toiles peuvent revendiquer l’appartenance à cette catégorie. La première, réalisée en 1864, immortalise une bataille navale de la guerre de Sécession s’étant déroulée au large de Cherbourg, entre le navire fédéral Kearsarge et le bâtiment confédéré Alabama. Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama, en dépeignant l’Alabama prêt à sombrer, est une annonce prémonitoire de la défaite finale des sudistes. Le fait que les deux bateaux soient relégués si loin en arrière-plan n’a pas été sans susciter des interrogations, Barbey d'Aurevilly ayant été jusqu’à avancer que ce choix de l’artiste rend la mer bien plus impressionnante que le combat lui-même.



1867 est une année riche en événements pour Manet : le peintre profite de l’Exposition universelle se tenant à Paris, au printemps, pour organiser sa propre exposition rétrospective et présenter une cinquantaine de ses toiles. S’inspirant de l’exemple de Gustave Courbet, qui avait eu recours à la même méthode pour se détourner du Salon officiel, Manet n’hésite pas à puiser fortement dans ses économies pour édifier son pavillon d’exposition, à proximité du pont de l'Alma, et pour organiser une véritable campagne de publicité avec le soutien d’Émile Zola. Le succès, cependant, n'a pas été à la hauteur des espérances de l’artiste : tant les critiques que le public ont boudé cette manifestation culturelle.





L'Exécution de Maximilien

1867 (252 x 305 cm)

Kunsthalle de Mannheim.Un fait extérieur allait malgré tout donner une nouvelle impulsion à la créativité du peintre : alors même que l’Exposition universelle n’est pas terminée, la nouvelle de l’exécution de Maximilien de Habsbourg, au Mexique, parvient jusqu’à la capitale française. Édouard Manet, depuis toujours fervent républicain, est scandalisé par la manière dont a fini ce jeune prince soutenu puis abandonné par Napoléon III (Voir Histoire du Mexique), et travaille plus d’une année à une grande toile commémorative et historique. Le résultat, très largement inspiré du Tres de Mayo de Francisco Goya, est cependant traité d’une manière radicalement différente. L'Exécution de Maximilien semble en effet dénuée de toute émotion violente : les soldats, que le peintre a vêtus d’uniformes de l’armée impériale française pour exprimer toute son indignation, abattent tranquillement Maximilien tandis que l’un d’eux est occupé à recharger son fusil et que les badauds se pressent au-dessus du mur.



Marines[modifier]



Clair de lune sur le port de Boulogne

1869 (82 x 101 cm)

Musée d'Orsay, Paris.À partir de 1868, les Manet ont pris l’habitude de passer leurs étés à Boulogne-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais, où ils ont fait l’acquisition d’un appartement. Outre le Déjeuner dans l'atelier, ces séjours répétés permettent à Édouard Manet de développer un genre qui l’a toujours beaucoup attiré, à savoir les marines et l’univers de la mer. Boulogne, important port de pêche, constitue alors une source d’inspiration inépuisable pour un peintre aimant tant les sujets naturalistes. Le saisissant Clair de lune sur le port de Boulogne, par exemple, dépeint le retour d’un bateau de pêche à la nuit tombée et l’attente des femmes de marins, sous la lumière laiteuse de la Lune. L’œuvre, tout à la fois pleine d’ombre et de lumière, est un remarquable hommage à la peinture de Rembrandt.





Le Départ du vapeur de Folkestone

1869 (60 x 73 cm)

Philadelphia Museum of Art.Les vacances boulonnaises voient la naissance d’autres toiles importantes, en particulier le Départ du vapeur de Folkestone, en 1869 : Manet y représente le bateau à aube assurant la liaison avec le port anglais de Folkestone, et sur lequel le peintre avait d’ailleurs embarqué l’année précédente pour visiter Londres. La dame habillée de blanc située le plus à gauche de la composition serait Suzanne Manet, accompagnée de son fils Léon. La toile, à l'inverse du Clair de Lune, est l'un des exemples les plus saisissants de la manière dont Manet sit jouer avec la lumière et les couleurs pour donner à ses tableaux une atmosphère de joie et d'insouciance. Le Bateau goudronné, a été peint sur la plage de Berck, et prend pour thème le travail des pêcheurs.



Cafés et restaurants[modifier]



Chez le père Lathuille

1879 (93 x 112 cm)

Musée des Beaux-Arts, Tournai.À la différence d’Edgar Degas, qui affiche une prédilection de plus en plus poussée pour la représentation du monde du travail et de la classe ouvrière, Édouard Manet a toujours préféré s’intéresser aux moments de loisirs : le thème du repos et de la détente, certes un peu frivole, permet cependant au peintre de capter avec précision et sensibilité le vécu de ses contemporains. Les cafés, et dans une moindre mesure les restaurants, constituent de ce point de vue l’endroit rêvé pour surprendre les scènes de la vie quotidienne des gens que Manet côtoie, le café parisien, étant à la fin du XIXe siècle le lieu de rendez-vous par excellence des milieux artistiques, littéraires, bourgeois et même aristocratiques. Manet arrive à rendre, le plus souvent avec beaucoup de poésie, l’atmosphère si particulière de ce lieu. C’est par exemple dans le cadre verdoyant et apaisé du restaurant Chez le père Lathuille, à Clichy, qu’un jeune homme s’empresse auprès d’une jeune femme et lui fait la cour.





Un bar aux Folies Bergère

1881 - 1882 (96 x 130 cm) Institut Courtauld, Londres.C’est dans le même univers que se situe la dernière œuvre majeure de Manet, intitulée Un bar aux Folies Bergère, réalisée alors que le peintre était déjà profondément rongé par la syphilis. La scène, contrairement aux apparences, n’a pas été peinte au bar des Folies Bergère mais a été entièrement recréée en atelier. La jeune femme servant de modèle, Suzon, est en revanche une véritable employée de ce célèbre café-concert. Les nombreux éléments présents sur le marbre du bar, qu’il s’agisse des bouteilles d’alcool, des fleurs ou des fruits, forment un ensemble pyramidal allant trouver son sommet, non sans malice, dans les fleurs qui ornent le corsage de la serveuse elle-même. Mais l’aspect qui a le plus retenu l’attention des critiques a été le reflet de Suzon dans le miroir. Ce dernier ne semble pas renvoyer une image exacte de la scène, tant en ce qui concerne la posture de la jeune femme que la présence de l’homme en face d’elle, si rapproché qu’il devrait logiquement tout cacher aux yeux du spectateur. Il est difficile de conclure si cette anomalie est le fruit de la volonté de l’artiste ou une simple erreur d’appréciation, ce qui n’a pas été sans amuser Huysmans. Ce dernier décrit avec délectation la manière dont le tableau « stupéfie les assistants qui se pressent en échangeant des observations désorientées sur le mirage de cette toile. »[réf. nécessaire]



La maladie et la mort[modifier]



Une fille dans le jardin à Bellevue représentant une maison du sentier des Pierres Blanches à Bellevue

1880 (92 x 70 cm)

Collection fondation E.G. Bührle, Zurich[62].

La botte d'asperges (1880) et une asperge seule.Édouard Manet, malade, fait une cure à Meudon Bellevue en 1880. Il séjourne au sentier des Pierres Blanches où il peindra plusieurs tableaux. Il obtient même un prix au Salon de 1881 et est décoré de la Légion d'honneur par son ami Antonin Proust devenu ministre des Arts : l'attribution est décidée malgré des oppositions fin 1881 et la cérémonie a lieu le 1er janvier 1882[63].



Affaibli depuis plusieurs années, il s’éteint finalement le 30 avril 1883 à l’âge de cinquante et un ans, des suites d’une ataxie locomotrice résultant elle-même d'une syphilis contractée à Rio. La maladie, outre les nombreuses souffrances et la paralysie partielle des membres qu’elle lui avait causées, a ensuite dégénéré en une gangrène qui a imposé de lui amputer le pied gauche onze jours avant sa mort[64]. L’enterrement a eu lieu le 3 mai 1883 au cimetière de Passy, en présence notamment d’Émile Zola, d'Alfred Stevens, de Claude Monet, d'Edgar Degas et de bien d’autres de ses anciennes connaissances. D’après Antonin Proust, son camarade de toujours, on voyait dans le convoi funèbre « des couronnes, des fleurs, beaucoup de femmes ». Degas, quant à lui, aurait dit alors de Manet qu’« il était plus grand que nous ne pensions »[5].



Un rôle majeur dans l'histoire de la peinture[modifier]



L'atelier de Manet par Fantin-LatourManet décrié, insulté, ridiculisé est devenu le chef de file reconnu des « avant-gardistes », et si le peintre a été lié aux acteurs du courant impressionniste, il est à tort considéré aujourd’hui comme l'un de ses pères[65], il n'en est qu'un puissant inspirateur autant par ses morceaux de peinture que par ses thèmes de prédilection. Sa manière de peindre soucieuse du réel reste en effet foncièrement différente de celle de Claude Monet ou de Camille Pissarro. Toutefois, certaines de ses œuvres sont proches de l'impressionnisme, c'est le cas de : L'Évasion de Rochefort, Portrait de Claude Monet peignant sur son bateau-atelier à Argenteuil et Une allée dans le jardin de Rueil.



Le maître laisse plus de quatre cents toiles et d’innombrables pastels, esquisses et aquarelles qui constituent une œuvre picturale majeure à l'influence certaine sur les artistes de son temps comme le groupe des Batignolles et bien au delà : Manet est en effet reconnu internationalement comme l’un des plus importants précurseurs de la peinture moderne [66] et ses tableaux majeurs sont visibles dans les plus grands musées du monde. C'est en 1907, ironie de l’histoire de la peinture, qu'Olympia « refusée » en 1863, entre, 44 ans après sa création, au Musée du Louvre (il est aujourd'hui au Musée d'Orsay). En l’an 2000, l’une de ses toiles s’est vendue à plus de vingt millions de dollars.

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